Les Mirauds volants vous proposent deux deux articles parus dans Sud Ouest à la rencontre de nos pratiques. Pour chacun, vous trouverez le lien vers la version internet, suivie d’une transposition totale de l’article (avec les légendes des illustration dans le corps du texte).

Bonne lecture!

Article 1: https://www.sudouest.fr/charente-maritime/saintes/je-me-suis-sentie-tellement-legere-non-voyant-et-pilote-d-avion-un-defi-pas-si-fou-pour-les-mirauds-volants-20646580.php

 

« Je me suis sentie tellement légère… » : non-voyant et pilote d’avion, un défi pas si fou pour les Mirauds volants

  Lecture 3 min

« Je me suis sentie tellement légère… » : non-voyant et pilote d’avion, un défi pas si fou pour les Mirauds volantsFanny a pris le manche dès son tout premier vol avec les Mirauds volants, guidée par un instructeur, Alex. © Crédit photo : Philippe Ménard / SO

Publié le 22/07/2024 à 17h00.

 

Du 10 au 14 juillet, cinq stagiaires venus de toute la France ont goûté aux joies de l’aviation à l’aérodrome de Saintes-Thénac. Embarquons avec Fanny pour une expérience hors norme qui défie les préjugés et la gravité

Sa canne blanche est posée sur le siège arrière. Alex Génicourt, l’instructeur, aide Fanny à s’installer dans le cockpit du Robin DR 400, sur l’aérodrome de Saintes-Thénac. « J’aime beaucoup, ça fait Sissi impératrice », plaisante la jeune femme. À vrai dire, elle n’en mène pas large. Derrière ses lunettes noires, elle ne perçoit que la lumière. Son premier réflexe est de toucher les écrans comme si elle les lisait en braille. C’est son premier vol dans un avion de tourisme, et c’est elle qui va tenir le manche, ce jeudi 11 juillet.

L’aérodrome de Saintes-Thénac accueille l’association depuis 2006.L’aérodrome de Saintes-Thénac accueille l’association depuis 2006.

Philippe Ménard / SO

L’association européenne des pilotes handicapés visuels accomplit ce miracle depuis 1999. Elle invite des non-voyants ou des malvoyants à se frotter aux joies du pilotage. Son surnom, « Les Mirauds volants », suggère bien le grain de folie qu’il faut pour imaginer pareille aventure. Quatre fois par an, des groupes de quatre à huit stagiaires s’initient à l’ULM, au planeur ou à l’avion à Tarbes, Saint-Etienne ou Saint-Gaudens. Entrée dans le jeu en 2006, l’aérodrome de Saintes accueillait cinq stagiaires du 10 au 14 juillet.

Fanny et Alex devant le Robin DR 400 qui emmène les stagiaires.Fanny et Alex devant le Robin DR 400 qui emmène les stagiaires.

Philippe Ménard / SO

« En apnée »

On embarque avec Fanny, maman de deux enfants, venue des Côtes-d’Armor. « Je tremble, mon Dieu », avoue-t-elle sans chichi. Alex délivre ses instructions alors que l’appareil commence déjà à s’élancer. « Si je n’y arrive pas, tu as ce qu’il faut ? » « Oui, l’appareil a des doubles commandes. Tu sens les pédales ? Je vais te donner des horaires. Si je te dis 10 droite, il faut incliner à gauche », répond-il, avec une décontraction contagieuse. « On va jusqu’au bout du monde ! », adhère Fanny en décollant.

Le vol s’élevait à environ 1 200 pieds.Le vol s’élevait à environ 1 200 pieds.

Philippe Ménard / SO

La canne blanche d’Alex a participé au voyage, posée à l’arrière.La canne blanche d’Alex a participé au voyage, posée à l’arrière.

Philippe Ménard / SO

Une vue du ciel de Saintes et de la zone naturelle de la Palu.Une vue du ciel de Saintes et de la zone naturelle de la Palu.

Philippe Ménard / SO

« Cela risque de bouger un peu, il y a beaucoup de nuages », prévient Alex. Effectivement, l’appareil tressaute parfois dans les trous d’air. Fanny apprend à corriger l’équilibre dans les turbulences. À 1 200 pieds, soit environ 350 mètres de hauteur, on perd vite ses repères. En quelques minutes, nous voilà au-dessus de Saint-Jean-d’Angély. « On pousse jusqu’en Bretagne ? », s’amuse la pilote. On retrouve les lacets de la Charente. « Tu ne connais pas Saint-Savinien ? » « Non. » « Bah c’est là… »

« Tu ne connais pas Saint-Savinien ? » « Non. » « Bah c’est là… »« Tu ne connais pas Saint-Savinien ? » « Non. » « Bah c’est là… »

Philippe Ménard / SO

L’instructeur, Alex, sait rassurer les stagiaires.L’instructeur, Alex, sait rassurer les stagiaires.

Philippe Ménard / SO

On croise une cigogne. À l’abord de la piste, Alex reprend les commandes. De quelques coups d’ailes plus prononcés, il déroule sa maîtrise d’ancien pilote militaire. Le plancher des vaches défile déjà sous les roues. « Ah, merci beaucoup… C’était vraiment une expérience. J’étais en apnée, contractée de partout », commente Fanny.

« On a une petite originalité, c’est tout. J’aimerais qu’on arrête dans nous cantonner dans le rôle de l’incapable »

Le temps de reprendre ses esprits, elle expose sa motivation. « On est des personnes totalement ordinaires. On a une petite originalité, c’est tout. J’aimerais qu’on arrête dans nous cantonner dans le rôle de l’incapable. Quelle satisfaction de se dire : ‘’je l’ai fait, et ce n’est pas si difficile’’. Je me suis rendu compte qu’on pouvait maîtriser les consignes. On nous dit de faire l’erreur pour la rectifier. Je me suis sentie tellement légère… »

Cette année, cinq stagiaires participaient au stage à Saintes.Cette année, cinq stagiaires participaient au stage à Saintes.

Philippe Ménard / SO

« Moi, je n’ai rien à prouver à personne », rebondit Marie, venue de région parisienne. Cette fois, son fidèle chien guide, Okapi, ne l’accompagnera pas. « Je suis preneuse de toutes les découvertes possibles. La vie est trop courte, il ne faut pas se poser de questions, il faut y aller. Je pratique aussi la randonnée en haute montagne. Je suis prête à tout, tant qu’on le fait en sécurité. »

Patrice, 76 ans, accumule les heures de vol depuis six ans.Patrice, 76 ans, accumule les heures de vol depuis six ans.

Philippe Ménard / SO

« Liberté extraordinaire »

Patrice, 76 ans, attend son tour avec impatience. Lui voit encore « un petit peu ». « J’ai commencé sur le tard, à 70 ans. C’est une sensation de liberté extraordinaire. Une liberté surveillée, mais la liberté quand même », décrit-il. Patrice se régale à tout tester. « Je préfère l’ULM, c’est plus léger, ça bouge beaucoup plus. »

L’association des Mirauds volants a 25 ans.L’association des Mirauds volants a 25 ans.

Philippe Ménard / SO

Un code traduit en braille

Les Mirauds volants ont pu approcher les sensations des valides grâce au « Sound flyer », un appareil qui donne des indications sonores sur le positionnement de l’avion. En l’air, les malvoyants les plus chevronnés frisent l’autonomie. « Il y en a certains qui pilotent mieux que certains membres du club. C’est très valorisant. Le seul problème, c’est le décollage et l’atterrissage. Il y a aussi plein de questions réglementaires. Mais ça apporte beaucoup de satisfactions, c’est quand même vachement bien », considère Alex, toujours aussi posé.

Le code à apprendre pour le BIA existe en braille.Le code à apprendre pour le BIA existe en braille.

Philippe Ménard / SO
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Les plus chevronnés se forment au brevet d’initiation aéronautique. L’aérodrome dispose d’un épais code dont chaque page a été traduite en braille. « On a une adhérente de 78 ans qui l’a passé et qui l’a réussi », rapporte Isabelle Fléchier, la secrétaire des Mirauds volants. L’association a été lancée par un Toulousain, Patrice Radiguet, qui avait appris à voler avec un ami. Elle compte aujourd’hui 34 adhérents, libres comme l’air.

 

Aviation en Nouvelle-Aquitaine : le comité régional aéronautique veut développer le « pilotage adapté »

  Lecture 1 min

Aviation en Nouvelle-Aquitaine : le comité régional aéronautique veut développer le « pilotage adapté »Membre du comité et de l’aéroclub de Saintes, Alain Martinez veut ouvrir la porte des cockpits à un maximum de gens. © Crédit photo : Philippe Ménard / SO

Publié le 23/07/2024 à 16h20.

 

L’aventure des Mirauds volants donne des idées au comité régional aéronautique de Nouvelle-Aquitaine, qui veut développer le « pilotage adapté » pour les personnes amputées ou malentendantes

L’expérience des Mirauds volants est suivie avec intérêt par le comité régional aéronautique de Nouvelle-Aquitaine. Puisque l’association fait piloter des non-voyants et des malvoyants, pourquoi ne pas imaginer d’autres publics qui pourraient se mettre aux commandes ? « Cela pourrait concerner des personnes handicapées au niveau des membres inférieures, ou des personnes malentendantes », considère Alain Martinez. Membre de l’aéroclub de Saintes, il siège au comité, où il s’occupe notamment de la formation au sein des 75 aéroclubs de Nouvelle-Aquitaine.

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Alain Martinez, ici avec Fanny et Isabelle, de l’association des Mirauds volants, veut partager le plaisir du pilotage mais aussi une « culture aéronautique » pour tous les publics.Alain Martinez, ici avec Fanny et Isabelle, de l’association des Mirauds volants, veut partager le plaisir du pilotage mais aussi une « culture aéronautique » pour tous les publics.

Philippe Ménard / SO

Il cherche à développer le « pilotage adapté ». « Pour nous, ce sont des pilotes, point. On essaie d’identifier les personnes intéressées. La difficulté, c’est que les gens ne savent pas qu’on existe, et qu’on ne sait pas comment leur dire qu’on existe. » Les Mirauds volants rencontrent un autre problème, la remise à jour du « Sound flyer », l’appareil qui aide les malvoyants à piloter. L’association recherche des partenaires qui pourraient s’emparer de ce défi humain et technologique.